A la recherche du temps perdu

Catégories Chroniques sensationnelles

Des yeux qui se savent tout petits, cloués sous les proues des sourcils qui s’affrontent. Des rides en Grand Canyon.
Des cils qui ont du mal à tenir si haut. Ils scrutent au loin le lit de leurs jumeaux lilliputiens. Toutes les 4 secondes, tentent des sorties pour les rejoindre.
Le muscle des paupières qui lutte, arqué dans son devoir.

Mal aux yeux de tant d’ennui.

Douleur sourde derrière les globes.
Des doigts s’approchent pour les frotter. Pour la centième fois.
L’os de chaque index roule un globe qui ne s’engloutira peut-être pas.
Finesse de la peau des paupières. Pression des billes sur le cerveau.
« Et toi, là-bas ! Reviens vers nous ! »

Puis la terre tremble plus au sud. L’œsophage gratte, la mâchoire se contracte. Le tonnerre roule dans les oreilles. Les mandibules décrochent …la gueule s’écartèle.
Un Moby Dick qui fait surface, goulue d’oxygène.

Tornade d’air sec dans les poumons.
Ça n’aura pas suffi.
Le monde flou est toujours là.

Sceller les lèvres, inspirer par le nez. Redresser le dos, abaisser les épaules.
Garde-à-vous. Gare à vous si vous ramollissez !
2 minutes de gagnées. Yeux écarquillés.

Mais le nuage est là, tout autour de la tête.
Même si des arcs-en-ciel peignent le cristallin, les images sont floues.
Même si des vibrations frappent sans cesse les tympans, les mots n’ont aucun sens.

Et Moby Dick revient.
De toujours plus profond, elle vient chercher son air.

Ecartelant la bouche, elle fait plisser le nez. Les yeux se désintègrent, plongent au fond de leur antre. L’arcade sourcilière embrasse la pommette. Il fait enfin tout noir.

Pause.
Quelques fractions de seconde peut-être, mais un répit quand même. Entre deux piloris.
Bailler pour s’échapper.

Mais la lumière revient. Et Moby Dick est troupeau.
Au-dessus des chemises et des soies colorées, on combat des béances. Main posée, bouché fermée, lutter par bienséance.

Et toujours tous ces mots, qui flottent, naufragés. Tristes d’être gâchés, de n’être pas brodés.
Ils cognent le nuage qui habite la tête, tentent de faire idée. Mais ils sont bien trop vides. Ils se brisent en poussière.

Les yeux toujours font mal. Le cœur s’en est allé.

Je ne vous dirai pas où je suis aujourd’hui, ce ne serait pas gentil.

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