Dès le premier pas, la brûlure des ampoules aux talons. Trophées des bravoures de la veille.
Le muscle avant de la cuisse gauche qui dit ne pas vouloir. Les mollets qui craquent.
Pinocchio plein d’échardes, guilleret petit garçon hier, qui s’éveille dans la nuit, de bois et de raideur.

Heureusement, matou lové au creux du ventre, le petit-déjeuner pèse avant même que ce jour ne commence.
Les forces sont recomposées. Le pain noir, le beurre et le café chaud se feront carburant tout au long de la montée.

Plus haut, les épaules acceptent le nouveau défi.
Elles balancent. Au rythme des coudes, elles envoient les bâtons découvrir la prochaine pierre, stabiliser le prochain pas.
Parce que c’est la nuit. Ni le début, ni la fin, juste le cœur de la nuit.
Alors le pied devine plus qu’il ne se pose.

Le goût du dentifrice fait le blanc de la neige. Et l’air frais tend la peau du visage.
Une brise timide dévale des hauteurs pour caresser les joues. Humide des neiges éternelles qui se devinent en haut des cimes. Pure de ce lieu majestueux où l’Homme n’aurait pas du pouvoir laisser sa trace.

Sans rancune, les montagnes entourent l’expédition de leur éternité fragile. Maternelles, elles couvent les premiers pas de la caravane, sous les palpitations des étoiles.
La Nature ouvre son giron pour le jour qui veut naitre.
Elle promet l’inoubliable.

Une fois la cadence installée, le silence du désert de pierres et de glace scande sa symphonie nocturne.
Le gargouillis d’une rivière, loin, ou dessous.
Le souffle court des bagnards qui savent que la journée sera longue.
Le bruit métallique des bâtons sur les pierres.
Les chocs lourds des semelles des godillots.
Un pied. Puis l’autre. Un pas. Puis l’autre.
Sans parole.

Ensemble.

Une petite lumière sur chaque front. Pour avancer comme en plein jour.
Une toute petite lumière sur chaque front, pour ne pas abîmer la nuit.

Un pied. Puis l’autre. Un pas. Puis l’autre.

Dans la nuit, une petite luciole d’amitié avance doucement entre les Montagnes.
Doucement.
Pour ne pas les déranger.

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