L’angle un peu usé de la tranche qui s’imprime dans la pulpe de trois phalanges. La légèreté des pages qui somnolent sur ma poitrine.
De l’autre côté de mon cœur, la douceur du coton caresse mon dos abandonné. Sous le tissu, du moelleux. Sa fermeté me porte.

L’air par les grottes de mes narines gonfle mes côtes pour soulever le livre.
Inspirer. Les mots s’envolent.
Expirer, ils me reviennent.
Le poids de ses mots sur la langueur de ma sieste. Les histoires de ses pages sur les rêves de ma somnolence.

Ma deuxième main repose sur les trois doigts des trois phalanges, comme celle tachetée d’un grand-père sur le front chaud d’un enfant. Lourde et sage, rassurante et éternelle.
Mon ventre a chaud par le dedans. Il bouge à peine.
L’air sur la peau de mes jambes, presque tiède, presque frais, m’empêche de sombrer complètement.

Dans mon crâne la musique de ses mots, sur mes lèvres la joie qu’il ait inventé eux … et dans ma gorge la honte d’être un petit peu jalouse.
Inspirer, les mots s’envolent.
Expirer et le livre m’embrasse.

La musique de ses mots dans le silence de ma sieste … et puis le bruit de l’eau qui fait les voix du chœur.

Mon esprit somnolent surfe chacune des vagues. Le frottement quand elle monte, le tambour quand elle casse.
Un rythme si régulier. Ce serait un Océan où le moulin à sel est devenu métronome.
Une vague. Elle monte. Elle casse. Elle tape. Une vague. Elle monte. Elle casse. Elle tape.
Et en voix de solistes, toutes les notes aigües des gouttelettes d’eau qui jaillissent du flux.

Un livre.
Un dimanche.
Un canapé.
Un lave-vaisselle.

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