Commence à faire plus frais.
Le soleil blanc est passé derrière le toit orange du voisin. L’ombre avance.
La fin du jour s’annonce.
Encore une bonne journée.
Le postérieur royalement ajusté sur les marches du perron, les épaules bien ouvertes en majesté, les membres immobiles de noblesse. J’observe.
Une grosse journée. Mais une bonne journée.
7 voitures sont passées. Dont une bleue. Un joli bleu. Bleu couverture.
Plusieurs promeneurs. A petits pas. Epaules dévalantes, dos courbé sur leur canne.
Les hommes sont petits ici. Et lents.
Pas moi.
Le soleil a bien bossé, pour un jour de ce temps. Je l’ai vu s’acharner à réchauffer la pierre des marches de mon perron. Trop blanc, trop bas … mais bien tenté mon pote !
Tu as plissé mes yeux.
Presque.
Alors que le silence envahit mon allée, m’apparaissent en creux les pépiements d’oiseaux. C’est le moment du monde où les petits adviennent. Qu’est-ce qu’ils ont pu piailler aujourd’hui, ces morveux !
Les colombes passent encore, c’est doux et guttural … mais les petits machins dans l’arbre du voisin!
Et ça piaille, et ça strille plus fort que son frangin. Ça se dispute à longueur de journée, et ça réclame encore sans jamais essayer.
Donnez-leur à bouffer … ou bouffez-les !
Le spectre du soir qui vient, ombre froide sur pierre grise, vient d’envahir la première marche. Le souffle de la nuit rampe vers mon postérieur.
Je vais tourner la tête.
Je peux tourner la tête, une fois de plus ce jour. J’ai cette force. J’ai pas peur du labeur. Grand-père était berger dans les montagnes autour.
Je tourne la tête.
Mon cou, souple et puissant coulisse avec grâce. Mes yeux en périscope découvre un autre lieu. Le jardin des voisins. Je sais rester de marbre.
Rien ne bouge. Tout va bien.
Ils me remercieraient si seulement ils savaient que je veille sur eux.
Je re-tourne la tête. Remet mes yeux dans l’axe. Pause pour reprendre mon souffle.
L’ombre du jour est là.
Mon maître va pas tarder. Me donnera ma pâtée.
Encore une grosse journée de glande. Suis rincé.