La licorne finit de dériver doucement. Sa crinière multicolore trempouille lamentablement au bout de son cou blanc brisé. Un ballon vert s’est réfugié dans un coin de mosaïques. Blotti auprès d’une bouée orange, il semble encore ahuri d’avoir survécu.

Quelques serviettes chanceuses reprennent leur souffle sur la barrière. Leurs congénères moins choyées croupissent leurs couleurs vives autour du champ de bataille.

Les enfants viennent de quitter la piscine.

 

J’entends le temps soupirer. Les cigales reprennent possession de l’air dans la paix retrouvée. En quelques minutes, l’océan déchainé s’est lifté en un rectangle turquoise, négligemment paré du reflet blanc d’un nuage égaré.

Si je veux y aller, c’est maintenant !

 

Quelques pages plus tard … la peau de mes cuisses croustille d’une joie coupable sous les rayons du soleil. Protégés par la paroi de mon ventre, chacun de mes organes somnole dans la chaleur. Mes joues sont en feu.

C’est maintenant.

Telle une écolière sur la poutre du gymnase, je plie une jambe, trempe un demi-pied. Ça va.

 

Je descends l’escalier. Quasiment rapidement. Un pied, l’autre. Une pause. Bracelet de cheville de la fraicheur topaze.

Je me laisse engloutir jusqu’en haut des cuisses. La licorne recommence à tanguer, je me fige. C’est un peu froid quand même !

Mollets saisis, serrés. Rotules remontées. Ventre rentré. Abdos contractés. Je me réfugie dans mes épaules, à la chaleur mordante du soleil qui m’observe.

 

Et maintenant… Mes paumes se joignent en prière, emportent mes bras, ma poitrine et mon ventre dans le liquide trop froid. Mon dos se cabre. Ma nuque se casse pour garder mon visage au soleil. Je souffle fort.

Une brasse. Deux brasses. Sang qui circule. Les cigales sont maintenant accompagnées d’un discret clapotis. Je brasse. La licorne tangue. Je brasse. Je plonge.

Je m’étends … je m’étire … je m’allonge toujours plus. Glisser sous la surface, crâne pointé pieds tendus. Sourire au bruit de l’eau quand je ressors la tête. Replonger dans l’onde parfaite, ouate dans les oreilles, bulles d’air chassées du nez. Emerger, yeux qui piquent. Replonger.

 

Et puis un cri. Aigu. Les enfants remontent à l’assaut !

Sortir de l’eau. Vite. Sonner le tocsin de l’apéro!

 

En repensant à ce week-end de juin

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


La période de vérification reCAPTCHA a expiré. Veuillez recharger la page.